Le séminaire de Félix Guattari. Enregistrer, décrypter, remettre en bon français, taper à la machine, faire des photocopies. Voilà ce qui me fut proposé un jour de décembre 1980. J’exultai, j’acceptai. Dans ma chambre de bonne au septième étage d’un immeuble du boulevard Raspail, je passai plusieurs nuits blanches à traquer un sens, des nuances, une clarté à ces phrases abstraites qui semblaient s’adresser directement à moi. C’était Noël, j’étais seule et sans eau courante mais je m’en foutais. Le soir du réveillon, j’allai voir un film de Stanley Kubrick où il y avait un labyrinthe, de la neige, un enfant, la folie et la mort. Je grignotais un sandwich à la sortie mais j’avais une boule dans la gorge et je remontais vite mon escalier de service pour terminer ce long travail. Mon travail ! Enfin j’ai un travail ! Les marches me semblaient moins rudes à monter, les murs de ma mansarde moins étroits, les fissures du toits moins menaçantes. Félix, je l’avais bien connu au temps de ma folie en 65 à La Borde. Pendant sept ans, je l’avais croisé dans les sentiers, à la cuisine, dans les salles à manger. Je l’aimais bien parce qu’aux fêtes et aux spectacles que nous donnions souvent dans la grande selle, il riait et applaudissait de bon cœur, sans réticence ni charité. Au S.C.A.J (Sous Commission des Activités Journalières), tous les midis, il savait donner la parole aux délires et susciter des projets d’animation assez grandioses. Entre temps, des livres de lui étaient sortis, avaient eu du succès, mais je ne parvenais pas à l’imaginer à Paris, faisant un séminaire.
Publié le 13 décembre 1983
13/12/1983 : Françoise Garbarini : Notes de la claviste

Voir aussi
18/01/83 : Félix Guattari, Barbara Glowczewski : Espaces de rêves (1), les Warlpiri
par
Barbara Glowczewski
,
Félix Guattari

Félix Guattari : Barbara est une ethnologue spécialiste des aborigènes d’Australie, qui a fait un travail passionnant sur le rêve. Je voudrais qu’elle nous parle un peu de la technologie collective du rêve chez ces (...)